L’actualité, avec son lot d’attentats et de violences perpétrées au nom de l’islam, interroge sur les sources de cette violence.
Entre ceux qui présentent l’islam comme une religion violente à sa source même, et ceux qui en font une religion de paix, partant d’une racine commune entre islam et salam paix, que faut-il penser ?
Dalila, une femme musulmane disait récemment : « Contrairement à ce que prétendent certains, l’islam n’est pas une religion de paix. C’est une religion qui amène à la paix, ce qui demande des efforts ».
Une religion qui demande donc un jihâd, selon l’étymologie du terme qui renvoie à la notion d’effort. Un effort, sans doute d’abord, dans la lecture et la réception du texte coranique.
Car interroger la place de la violence dans le Coran, c’est interroger le Coran lui-même, qui contient des versets de guerre et des versets de paix, la manière de le lire et de l’interpréter.
C’est prendre en compte le contexte dans lequel le texte a été élaboré, analyser le vocabulaire, tel le jihâd, se confronter aux versets « difficiles » pour chercher à les comprendre et interroger la notion d’abrogation utilisée comme réponse aux contradictions internes au Coran.
Cette réflexion n’a pas la prétention de faire le tour de la question, mais en abordant ces divers aspects, va chercher à éclairer le sens de cette violence présente dans le texte coranique et à questionner l’utilisation qui en est faite aujourd’hui.
1. La lecture du Coran :
- La question de la violence, présente dans le corpus coranique, doit s’inscrire dans une vue d’ensemble du Coran.
Dans son texte, Lire le Coran aujourd’hui, Rachid Benzine[1] dénonce des lectures faussées du texte coranique :
- Une Lecture fondamentaliste littéraliste, une « lecture éternelle » immuable qui
surgirait du seul texte, sans distance réflexive, sans ce discernement auquel le texte lui-même appelle, semble-t-il, et dont un des noms, Furqan, signifie discernement (même si d’autres traductions peuvent être appliquées à ce terme).
- Lecture « mutilatrice » du texte, estimant que de nombreux versets sont devenus
caduques, parce que posant problèmes à notre époque, à notre compréhension, à notre lecture.
- Lecture « mutilatrice », qui peut être le fait aussi, de la fameuse thèse abrogationniste.
sur laquelle nous reviendrons plus loin.
- Lecture utilitaire et décontextualisée du texte n’utilisant que certains versets selon la
thèse que l’on soutient, versets de paix contre versets de guerre et vice versa…des versets isolés de leur contexte au risque de leur faire dire le contraire de ce que l’auteur a voulu dire ou signifier.
Quoiqu’il en soit, les versets difficiles sont là, faisant partie intégrante du texte, de sa cohérence, de son unité. Il nous faut donc nous confronter au texte et en chercher le sens pour aujourd’hui en regardant tout d’abord le contexte dans lequel ces versets s’inscrivent.
2. Le contexte :
Nous l’avons dit les versets coraniques doivent être lus dans le contexte de leur révélation, ce qui évite une lecture partielle et partiale, intemporelle et anachronique.
L’islam nait donc en Arabie au VII° siècle de notre ère, dans une société tribale, et des conditions de vie difficiles. L’Arabie du temps de Mohamed est marquée par la violence de la nature et des hommes. Les razzias définissent les rapports entre les arabes et le reste de l’Orient comme celle des bédouins entre eux. Il s’agit d’une violence instituée, une lutte pour la survie. A côté du commerce et de l’élevage, la guerre est sans doute, l’activité principale des hommes, un instrument économique et politique, signe des rivalités qui existent entre les tribus.
Cependant, pour les tribus, la guerre n’est pas une fin en soi. L’essentiel est la survie de la tribu et donc des individus qui la composent. il s’agit de préserver la vie, de maintenir l’intégrité et la cohésion du groupe, toute mort affaiblissant les liens tribaux. Le Coran insiste ainsi sur la nécessité de préserver la vie, même lors des conflits.
« Ne tuez qu’en toute justice la vie que Dieu a faite sacrée[2] »
« Combattez sur le chemin de Dieu ceux qui vous combattent, sans pour autant commettre d’agression. Dieu déteste les agresseurs [3]».
Violence donc des rapports tribaux mais une violence que le Coran rapporte et cherche à ordonner et maitriser.
Si cette la violence présente dans le Coran a ses origines dans la culture ambiante elle se trouve aussi dans l’expérience personnelle de Muhammad [4].
Mohamed dès son enfance est confronté à la dureté de la vie, orphelin il connaît une certaine précarité avant de connaître l’abondance. Sa première prédication va se heurter à l’hostilité grandissante des Mecquois. Car c’est une révolution sociale et religieuse qu’il propose. Il est, à cause de cela, rejeté de son clan et finalement contraint de quitter La Mecque pour Médine en 622. A Médine il va s’imposer comme arbitre puis un chef incontesté de la communauté naissante. Le pacte d’Aqaba, renforcé par ce que l’on appelle le pacte ou Constitution de Médine, fait de lui le chef d’une communauté qui rassemble musulmans et juifs. Le texte institue des méthodes pacifiques de règlement des différends entre divers groupes vivant en un seul peuple, en respectant les spécificités religieuses des uns et des autres. D’autre part, la Constitution de Médine établit des relations de foi au-dessus des liens de sang et souligne la responsabilité individuelle. Les identités tribales demeurent importantes, et sont utilisées pour désigner les différents groupes, mais le « principal lien contraignant » pour communauté naissante est la religion.
Pour assurer les ressources de cette communauté, le système traditionnel de la razzia est utilisé. Et pour survivre face à l’hostilité des mecquois, il fallait s’engager dans la lutte armée.
S’ouvre le temps du combat pour Dieu « Combattez dans le chemin de Dieu[5] ». Ce combat pour Dieu, cet effort, littéralement Jihâd dans la voie de Dieu, est un effort consenti, volontaire et temporaire, au service de la cause de Mohammed, contre la Mecque.
Mohammed s’inscrit dans le cadre d’une société tribale qui ne fonctionne pas sur le mode de la contrainte, « Point de contrainte en religion[6] » reprend le Coran, mais sur celui d’une obéissance consentie, contractuelle.
Cela signifie d’engager ses biens et /ou sa personne : « Dieu place à un rang supérieur, ceux qui s’engagent de leurs biens et de leurs personnes ; à chacun Dieu fait promesse du meilleur.[7] »
Dans la guerre menée contre la Mecque, la première grande victoire de Badr en 624, sera interprétée comme un Signe de Dieu[8]. L’imaginaire religieux se mêle au politique pour le justifier et le glorifier. Mais l’échec devient aussi l’expression de la volonté de Dieu et permet de justifier une des grandes vertus musulmanes la patience, l développée dans la théorie du jihâd.
Les appels à participer à ce combat, à cet effort sont nombreux dans le Coran, signe peut-être que les ralliements ne sont pas immédiats, même si la lecture croyante va y puiser un surcroît de ferveur.
L’appel s’accompagne d’une promesse et d’une menace eschatologiques. L’historienne et anthropologue Jacqueline Chabbi[9], distingue la violence du discours, avec ces appels au combat et la violence en acte, celle de la guerre menée.
Un discours rempli de violence divine eschatologique à la Mecque, une parole exacerbée, menaçante à Médine, pour un prophète qui, à bout d’arguments, notamment contre les juifs passe à la violence physique.
Désormais les combats sont réels, d’abord contre les polythéistes de la Mecque, puis contre les tribus juives à la suite de la trahison du pacte, la conquête du nord de l’Arabie, jusqu’à la « conquête » de La Mecque en 630.
Le prophète de la Mecque est devenu un chef de guerre qui va unifier les tribus arabes sous la bannière de l’islam.
« La guerre bédouine se transforme en guerre sainte pour Dieu », « Le paradis étant à l’ombre des épées » selon un hadith. [10]
On se trouve face à un chef de tribu qui recourt à la force pour imposer sa domination sur un territoire. Le discours divin est convoqué à postériori pour légitimer un acte politique, comme le montrent les hadiths.
Des raisons économiques et politiques expliquent cette violence et ces batailles déployées sous l’autorité de Mohammed.
Au début du VIII° siècle, bien après la mort de Mohammed, l’islam va passer d’une religion confinée à la péninsule arabique à une religion impériale étendue sur un vaste territoire. Les gouvernants, parfois aidés par les théologiens, ont eu tendance à interpréter les textes religieux pour légitimer l’expansion guerrière et asseoir leur pouvoir par la force.
S’il faut chercher une légitimation de la violence dans l’islam c’est à cette époque et dans les textes tardifs qu’on peut la trouver autant, sinon plus, que dans le Coran.
Notamment dans la biographie du prophète d’Ibn Ishaq (704-767) remaniée par Ibn Hishâm (mort vers 834). C’est dans ce livre que l’on trouve la plupart des récits relatifs aux batailles attribuées au prophète ainsi que le fameux épisode du massacre de tous les hommes de la tribu juive des banû Qurayzha de 600 à 900 selon les versions après qu’ils se soient alliés avec les polythéistes de la Mecque.
Jacqueline Chabbi montre que le recours à la violence physique contre les juifs ne montre pas un antijudaïsme essentiel inscrit dans le Coran mais est la conséquence de la rupture d’un pacte et la nécessité d’un pouvoir politique. Ce sera l’apologétique postérieure qui imposera la lecture du châtiment divin contre les juifs qui serait annoncé dans le Coran.
C’est aussi à cette époque tardive que les écoles juridiques vont théoriser le jihâd lui donnant une valeur absolue.
Ainsi sous Mohammed comme plus tard dans l’empire la nécessité politique va être légitimée par le discours divin.
3. Le jihâd
Le terme jihâd signifie effort et non guerre qui se dit en arabe harb[11] et encore moins guerre sainte.
Il est utilisé une trentaine de fois dans le Coran sous des formes nominales ou verbales, le plus souvent pour signifier l’effort que le musulman doit déployer pour protéger les croyants des agressions provenant des tribus polythéistes de la péninsule arabique.
Le mot jihâd n’apparaît pas dans les débuts de la révélation et de la prédication de Mohammed. Il va par la suite, être retenu dans la période médinoise pour désigner la lutte réelle à mener dans « le chemin de Dieu » et qui souligne en même temps l’effort à continuer en vue de l’appel à l’islam.
La notion de jihâd connote un effort soutenu pour aboutir à un résultat, un effort dirigé vers un objectif déterminé. D’où plusieurs acceptions du terme : s’atteler résolument à une tâche, résister opiniâtrement à l’adversité ou lutter pour survivre, éventuellement en combattant un adversaire. Il s’agit d’une « lutte contre » qui n’implique pas forcément la guerre.
Au cours de la période mekkoise, le terme a une signification essentiellement morale et spirituelle. Il s’agit de tenir bon, face aux complots des polythéistes mecquois, de préserver la foi musulmane naissante et de ne pas céder au désespoir. Ce jihâd, requiert du croyant patience et persévérance face à l’adversité.
A Médine, le terme acquiert un sens matériel : résister à l’agression mais davantage, donner à la communauté les moyens de subsister et de s’organiser par des contributions financières, ce qui va se traduire par des razzias[12].
Le sens matériel va finir par l’emporter sur le sens spirituel en raison des circonstances.
Le jihâd apparaît comme un ordre venant de Dieu qui en fait un devoir pour les croyants au même titre que l’adoration, la prière ou l’aumône.
La notion de Jihâd débouche peu à peu sur l’idée de « combat », traduite en arabe par qitâl. La racine QTL renvoie à la notion de tuer ou plutôt au fait de combattre quelqu’un, non dans l’intention de le tuer, mais au risque de tuer ou d’être tué.
Le verbe ou le nom d’action se retrouvent dans le Coran y compris sous la forme d’impératif, « combattez » dans douze occurrences de la période médinoise.
Le terme arabe pour évoquer le meurtre ou le fait de tuer est celui de qatl, avec le verbe qatala, de la même racine que qitâl, qâtala signifiant combattre, lutter. Il est donc important d’aller vérifier en arabe le terme utilisé dans les différents versets pour bien comprendre de quoi l’on parle et ce que peuvent induire telle ou telle traduction.
Dans le contexte des tribus arabes du VIII° siècle, lorsqu’un meurtre est commis le meurtrier devait être tué à son tour. C’est une manière de préserver l’honneur de la tribu et de garantir la stabilité des relations intertribales mais cela pouvait conduire à des vengeances sans fin.
A travers les nombreuses occurrences dans le Coran de cette notion, des exégètes ont vu le fait que Dieu insistait sur les conséquences désastreuses du meurtre dans la société.
On peut le lire à travers le récit de Caïn et Abel, l’évocation des crimes contre les prophètes, le rappel de la lutte menée par des personnages bibliques[13]. D’autres passages du Coran parlent de la dure réalité des relations tribales insistant sur la nécessité de ne pas céder à la vengeance, en appelant à l’autorité légale pour régler les conflits.
La mort apparaît comme un risque plus que comme une intention souligne Jacqueline Chabbi [14]encore moins comme une chance à saisir comme l’entendent certaines idéologies actuelles. Dès que la négociation est possible on cherche un compromis ainsi en sera-t-il en 628, avec un pacte de dix ans de cessation des hostilités avec La Mecque.
Il faut aussi souligner que tuer de manière inconsidérée ou massacrer gratuitement constitue une transgression majeure rappelée par le Coran.
« Combattez dans la voie de Dieu ceux qui vous combattent mais ne commettez pas d’agression (inconsidérée) ; Dieu n’aime pas les transgresseurs [15]»
Quelques passages du Coran évoquent la mise à mort des ennemis au combat dont le fameux verset Sourate 9 verset 5 sur lequel nous reviendrons plus loin.
Mais le passage dans lequel il se trouve pose clairement un cadre restrictif au conflit armé et privilégie la négociation afin de faire cesser les hostilités le plus rapidement.
Si la guerre est autorisée, le Coran en définit les limites[16]. Le jihâd en tant que guerre « sainte » doit répondre, selon le Coran, à des exigences précises : une cause et un ennemi bien définis, des limites strictes et une éthique de guerre.
Ceci ne veut pas dire que les sociétés musulmanes n’évolueront pas, dans le temps et des contextes particuliers, dans le sens d’une agressivité débridée.
Jihâd et qitâl en viendront à se confondre et à dériver dans l’empire musulman. Ce n’était pas le cas au départ. En cette époque médiévale, on n’est bien sûr pas dans l’angélisme dans la société tribale de Mohammed comme d’ailleurs en occident, mais dans « des comportements sociaux codifiés contraints par la pratique collective et les conditions de vie » écrit Jacqueline Chabbi[17].
Le Coran cherche sans cesse à conjurer la crainte de mourir au combat mais aussi à modérer l’action de combat comme il évite à la fois tout message à caractère général du combat hors du cadre historique de l’origine et toute globalisation des adversaires.
« La guerre coranique n’est pas sainte, écrit Jacqueline Chabbi. Elle ne peut être que de son temps. Il s’agit d’une guerre classiquement tribale et qui ne déroge en rien aux contraintes déjà présentes dans ce milieu humain. Il est donc complètement incongru d’extrapoler ces paroles contextuelles. Le combat quelles que soient les légitimités qu’il s’invente, est affaire d’homme et non affaires de dieux.[18] »
Au-delà du Coran, le jihâd va faire l’objet d’une codification savante dans le droit musulman. « Le jihâd est la meilleure des œuvres surrérogatoires » ou encore « le jihâd est la meilleure des formes de service volontaire que l’homme consacre à Dieu » selon ibn Taymiyya, le maître à penser des jihadistes d’aujourd’hui, dans son traité du droit.
Le jihâd est mis par certains sur le même pied que les cinq piliers de l’islam, obligation du croyant envers Dieu mais une obligation communautaire et non personnelle.
Le but du jihâd n’est pas de tuer mais d’appeler à l’islam, il s’agit de faire régner l’ordre initial voulu par Dieu et qu’incarne l’islam, comme religion naturelle de l’humanité selon le Coran.
Le jihâd apparaît à la fois comme une théorie de la guerre juste, permise, obligée ou interdite et une pratique stratégique.
En fait deux conceptions existent chez les juristes, politologues et théologiens :
- L’une est offensive : l’islam, doit s’étendre par la force sur les nations et les sociétés
non soumises et qui « appelées » ont refusé. C’est l’interprétation qui a justifié les conquêtes musulmanes, même si celles-ci ne sont pas toutes guerrières.
- L’autre est défensive : elle se borne à affirmer la juste protection de l’islam, de sa terre
et de ses fidèles mais ne permet que l’on combatte l’infidèle que par la propagande et la persuasion. Le jihâd se manifeste avant tout par la persuasion orale. Mais aussi par la recherche d’alliances dans un contexte de tensions, d’où l’alternance des passages coraniques sur la préparation psychologique au combat défensif et d’autres passages sur la nécessité d’une coexistence pacifique se traduisant par des relations apaisées entre les tribus.
En fait ces deux conceptions sont complémentaires, l’accentuation de l’une ou l’autre résulte des circonstances et d’une idéologie. Il est clair que dans la pratique l’islam a dû s’accommoder des situations diverses qui se sont présentées et pratiquer le plus souvent la coexistence.
Comme nous venons de le voir nous ne pouvons ignorer la notion de jihâd entendu comme guerre militaire menée contre les infidèles ou les mauvais musulmans, présente dans le Coran, vécue par Mohammed, codifiée et amplifiée par la Tradition musulmane et à laquelle tout musulman est appelé au nom de Dieu, par Dieu lui-même.
Cependant un hadith rapporte ces paroles de Muhammad au retour d’une expédition guerrière :
« Nous voici de retour du jihâd mineur, du jihâd militaire, du combat contre les polythéistes, les mécréants et les faiseurs de dieux ; vers le jihâd majeur, le jihâd spirituel,
la lutte contre soi-même qui consiste en la purification de l’âme, la lutte contre le mal,
contre Satan, une lutte à mener en chacun de nous, en paroles et en actes et au plus profond de soi-même et cela par une volonté individuelle et collective de dépassement
pour former un homme meilleur, une meilleure société humaine ».
La notion de jihâd majeur, retrouve le sens premier du terme qui est, nous l’avons dit, celui d’effort. Et s’il reste une guerre, le jihâd majeur est combat contre soi-même, combat spirituel à mener contre les ennemis intérieurs.
Si le jihâd majeur revêt un caractère individualiste, c’est à toute la communauté qu’il revient de commander le bien[19].
Le Coran contient de nombreux passages qui permettent de faire une lecture « spirituelle » du jihâd et les mystiques les ont largement utilisés. Pour eux, la guerre à mener est celle du combat contre les passions mauvaises à l’intérieur de chaque homme. La maîtrise et le pardon sont largement recommandés[20]. Les mystiques ont mis en avant les passages qui encourageaient avant tout la piété[21].
Il est clair que le Coran peut servir d’appui pour telle ou telle lecture, telle ou telle interprétation, la période médinoise pouvant fournir des arguments en faveur de la guerre, les trois périodes mekkoises permettant de prendre des distances par rapport à elle en donnant de quoi méditer sur la purification du croyant.
Pour les mystiques, l’homme qui fait l’expérience de Dieu ne peut connaître l’intolérance et la guerre sainte.
« Je professe la religion de l’amour et je vais où veut sa monture que j’aille car l’amour est mon credo et ma foi ». Hallaj le grand mystique musulman a choisi le chemin de Dieu et l’a payé de sa vie.
Selon certains, le grand jihâd a une dimension ascétique et mystique, comme effort de l’âme pour dépasser les contradictions et rechercher l’harmonie avec Dieu. Mais il s’agit aussi de « lutter » contre la pauvreté, l’exploitation. La guerre à mener est aussi cet « effort pacifique » en vue du développement économique ou culturel. C’est ainsi que l’interprètent un certain nombre de musulmans aujourd’hui.
Ainsi, on peut dire, avec certains musulmans d’aujourd’hui que le jihâd apparaît avoir deux significations, l’une originelle de nature religieuse et l’autre acquise au cours de l’histoire de nature politique. « Nous ne doutons pas que le sens originel finira par triompher pour que le jihâd devienne un instrument de justice et de clémence et non une arme de violence et de guerre[22] ».
4. Des versets difficiles
Le Coran passe pour un texte traversé par la violence et porteur d’incitations guerrières qui nourrissent lesjihadistes contemporains.
Si l’on cherche de la violence dans le Coran, on en trouve bien évidemment, comme d’ailleurs dans la Bible. Il est assez habituel de lancer aux musulmans, qui mettent en avant la paix coranique, les versets porteurs de violence, pour leur contester tout chemin pacifique dans le Coran, comme l’on entend les jihadistesd’aujourd’hui justifier leurs actes avec ces mêmes versets. Sortir l’un ou l’autre verset de son contexte est, nous l’avons dit, une lecture qui ne donne pas accès au sens du texte et que nous dénonçons. Mais il nous a paru important de ne pas faire ici l’impasse de ces versets « difficiles », justement pour les contextualiser.
Le discours mecquois est imprégné de violence divine à travers l’annonce du jugement promis à ceux qui ne se convertissent pas. Mohammed n’a alors que la force de sa parole et de la parole divine annonciatrice d’une menace terrifiante et imminente. On se situe là dans le texte coranique dans un discours de genre apocalyptique.
A Médine c’est le temps de l’action, nous l’avons dit, et de l’attaque de tous ceux qui s’opposent au message.
Mais cette action est limitée aux règles communes de la société tribale. Si la menace eschatologique demeure, la violence est aussi effective dans la guerre menée contre la Mecque notamment, mais aussi contre les juifs.
Vis-à-vis d’eux, le Coran va aller de l’incompréhension, au désappointement jusqu’à la dispute dans une polémique de plus en plus virulente et finalement l’action violente.
« Maudits soient-ils ! Où qu’ils se terrent ils seront pris et tués jusqu’au dernier.[23] »
Le terrible verset 33 de la sourate 5 rappelle le sort des tribus juives, celles qui sont bannies et celles dont les hommes sont tués :
« Telle sera la rétribution de ceux qui font la guerre contre Dieu et contre son prophète
et de ceux qui exercent la violence sur la terre : ils seront tués ou crucifiés, ou bien leur main droite et leur pied gauche seront coupés ou bien ils seront expulsés du pays.
Tel sera leur sort la honte en ce monde et le terrible châtiment dans la vie future. ».
Verset violent s’il en est, difficile à interpréter, d’autant plus qu’il suit un passage souvent cité par les musulmans sur l’interdiction du meurtre tel que prescrit aux fils d’Israël :
« Celui qui a tué un homme qui lui-même n’a pas tué ou qui n’a pas commis de violence, sur la terre est considéré comme s’il avait tué tous les hommes ; et celui qui sauve un seul homme est considéré comme s’il avait sauvé tous les hommes. [24]»
Ce verset qui énonce le principe fondamental et universel de l’interdit du meurtre est précédé par le récit du crime de Caïn qui tue son frère, qui n’étends pas la main sur lui et suivi par ce terrible verset qui punit tous ceux qui sont coupables de « désordre sur la terre » et « combattent Dieu et son envoyé ». Les mains criminelles, celle de Caïn étendue pour tuer (v 28) et celle des abuseurs (v. 33 et 38) sont promise au châtiment pour leur crime. L’ensemble est scandé par la possibilité de la repentance et du pardon du Dieu « pardonneur et miséricordieux » (V.34 et 39)[25].
Parmi ces versets de violence nous pouvons regarder l’un des plus difficiles, à entendre aujourd’hui, dans la sourate la plus violente, et souvent cité pour justifier ce qui serait la violence intrinsèque du Coran, le verset dit « du sabre » sourate 9 verset 5 :
« Après que les mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez. Capturez-les, assiégez-les et guettez-les ; tendez-leur des embuscades. Si ensuite ils se repentent, accomplissent la prière et donne la contribution de solidarité, alors laissez-les aller ; Dieu est Pardonne et est Miséricordieux. »
Ce verset comme ceux qui précèdent et suivent s’inscrivent dans un contexte de guerre entre La Mecque et la communauté de Mohammed à Médine. Mohammed revient de la Mecque d’où il a été chassé quelques années plus tôt. Au cœur de cette guerre un pacte a été signé[26] (v1.) et ce pacte n’a pas été respecté. Or l’équilibre de la société de ce temps est assuré par les pactes entre tribus.
Si ce contexte n’excuse pas la violence il l’explique. La parole donnée a été trahi, l’injonction répond à l’agression première. Ce que rappelle la sourate 2 versets 190-192, déjà cités qui donnent les règles du combat :
« Combattez dans la voie de Dieu ceux qui vous combattent ; mais ne soyez pas agresseurs (sans raison) Dieu n’aime pas les agresseurs. Tuez-les où que vous les trouviez, chassez-les d’où ils vous chassés ; la sédition est pire que le meurtre ; mais ne les combattez pas près d’un lieu de prosternation bien protégé à moins qu’ils ne vous y combattent ; alors tuez-les telle est la rétribution de ceux qui récusent. Mais s’ils cessent Dieu leur pardonnera et sera miséricordieux. »
Le discours coranique se conforme aux règles tribales du combat et au respect des pactes scellés.
Revenant à la sourate 9, il est important de le situer dans l’ensemble du passage.
Il est suivi de l’invitation à accorder asile à une partie d’entre eux[27], ce qui suppose donc qu’il n’est pas demandé de tous les tuer. Et il est dit aux versets 7 et 11 qu’à l’inverse de la violence, la droiture et la repentance suffisent à mettre fin au conflit et à transformer les ennemis en « frères en religion ».
On doit également citer dans la même sourate le verset 29 appliqué aux gens du Livre, souvent cité pour dénoncer la violence du Coran envers juifs et chrétiens :
« Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu et au Jour dernier ; ceux qui ne déclarent pas illicite ce que Dieu et son prophète ont déclaré illicite. Ceux qui parmi les gens du livre ne pratiquent pas la vraie religion. Combattez- les jusqu’à ce qu’ils payent directement le tribut après s’être humiliés. ».
Précisons simplement qu’Il s’agit de « ceux qui » et non de tous, comme souvent dans le texte, la visée n’est pas de tuer puisque le but est qu’ils paient le tribut, c’est-à-dire l’impôt de solidarité mais aussi de soumission, dans une société à majorité musulmane qui les accepte donc.
Ceci dit encore une fois ne sortons pas l’un ou l’autre verset de son contexte coranique et culturel.
Ces versets difficiles, ceux de violence, on pourrait en citer d’autres, attestent de l’historicité du texte coranique, de son enracinement dans une culture précise. La prise en compte de l’humanité avec ce qu’elle a de meilleur et de pire.
Rachid Benzine écrit ceci : « La révélation coranique est un vrai reflet de ce qui fait l’humanité. Il ne s’agit pas d’une révélation qui ne ferait qu’effleurer « le vécu des hommes. Cette révélation est porteuse de la chair et du sang des humains, de leur intelligence et de leur aveuglement, de leur générosité et de leur violence, de leurs instincts de vie comme de leurs instincts de mort : elle s’adresse à l’homme dans ses limites. [28]»
Cependant le verset 5 de la sourate 9 ci-dessus mentionné, est important dans l’interprétation qui va en être faite par la suite se focalisant sur l’injonction de tuer plus que sur les recommandations annexes qui l’entourent et va fonder la thèse de l’abrogation.
La thèse de l’abrogation :
Une des méthodes traditionnelles d’interprétation du Coran présentée par les juristes musulmans est celle de l’abrogation de certains versets par d’autres. Cette thèse de l’abrogation, développée à partir des Abbassides (Fin VIII° début IX°) puis davantage élaborée à partir des recherches d’Ibn Taymiyya (1263 -1328 Damas) et d’Ibn Kathir (1301-1373 Damas) et toujours en vigueur aujourd’hui, permet de surmonter les apparentes contradictions du texte, essentiellement dans le domaine de la norme.
Elle s’appuie sur le verset 106 de la sourate 5 :
« Si Nous abrogeons un verset quelconque ou que Nous le fassions oublier, Nous en apportons un meilleur, ou un semblable. Ne sais-tu pas que Dieu est tout puissant ? ».
A partir de là on a considéré que les versets les plus récents abrogent les plus anciens, donc les plus rigoureux et restrictifs abrogeraient les plus tolérants.
Or, ce verset s’inscrit dans un long passage, traitant de la révélation, dans le cadre d’une controverse avec certains juifs de Médine accusant Mohammed de falsification dans la récitation de versets de la Torah intégrés au Coran.
Il s’agirait donc, non d’une abrogation de versets coraniques, ce qui signifierait que Dieu abrogerait sa parole, mais pour certains, de la Torah, ce qui est surprenant puisque le Coran répète qu’il confirme les Écritures antérieures. Finalement, cela concernerait plutôt certains versets de celle-ci.
Le terme utilisé en arabe pour dire verset est ayâ qui dans son sens le plus courant dans le Coran est traduit par signe, et signe de Dieu. Notion très importante en islam, car Dieu se manifeste par des signes.
C’est ainsi que traduit Maurice Gloton : « Que nous supprimions un Signe ou que nous le fassions oublier, nous en apporterions un meilleur ou équivalent. »
Le sens du verset devient moins clair sans doute, et plus spirituel que normatif.
Peut-on penser que cela signifie que Dieu envoie de nouveaux signes, plus parlant pour ce temps précis de la révélation ? Certains exégètes le disent. Il s’agit donc d’être attentif aux signes, le Coran ne cesse d’y inviter le croyant, signes de Dieu à voir et interpréter pour aujourd’hui.
Cette question de l’abrogation est d’une grande actualité́, car les fondamentalistes islamistes s’en servent pour considérer notamment que les versets les plus durs de la sourate 9, en particulier le verset dit « de l’épée », abrogerait plus d’une centaine d’autres versets plus conciliants.
Plusieurs penseurs musulmans ont remis en cause cette thèse de l’abrogation, faisant primer les versets plus universels sur ceux qui sont conjoncturels ainsi Abdelwahhab Meddeb écrit : « C’est justement ledit verset de l’épée qui est abrogé du fait qu’il appartient à une conjecture historique et anthropologique révolue, la permanence se trouvant du côté des trois autres versets qui le contredisent : « Nulle contrainte en religion [29]» ; « Appelle les hommes dans le chemin de ton Seigneur par la sagesse et une belle exhortation ; discute avec eux de la meilleure manière[30] ».
Abdessalem Souiki, imam et théologien musulman, réfute de manière catégorique la thèse abrogationniste. [31]
Il distingue dans le Coran une première catégorie de versets qui constituent la matrice du texte et sont les arbitres de l’ensemble et une seconde catégorie de versets ouverts à plusieurs interprétations, qui interpellent le croyant et l’invitent à pratiquer l’ijtihad, l’effort de réflexion personnelle faisant de lui « le coauteur du sens du Coran à défaut d’être le coauteur du texte lui-même ». Pour lui la clé herméneutique est le verset 7 de la sourate 3 :
« C’est Lui (Dieu) qui a fait descendre sur toi le Livre. On y trouve des versets clairs -La mère du Livre- et d’autres obscurs. Ceux dont les cœurs penchent vers l’erreur s’attachent à ce qui est obscur car ils recherchent la discorde et ils sont avides d’interprétations ; mais nul autre que Dieu ne connaît l’interprétation du Livre. Ceux qui sont enracinés dans la science d disent « Nous y croyons ! Tout vient de notre Seigneur ! » mais seuls les hommes doués d’intelligence s’en souviennent. »
L’invitation à l’ijtihâd ouvre à une liberté d’interprétation à quatre conditions :
- Respecter la première catégorie de verset comme référence d’interprétation, instance
Arbitrale : ne pas faire dire au texte n’importe quoi en contradiction avec une valeur fondamentale.
- Être bien intentionné : ne pas inféoder la parole de Dieu à la sienne, venir avec des a
priori et chercher dans le Coran de quoi les soutenir ; se laisser nourrir par la parole de Dieu avec un cœur purifié.
- Relativiser l’interprétation personnelle : laisser la parenthèse ouverte à d’autres
personnes, d’autres générations, il y a un au-delà du texte.
- Être averti en matière d’exégèse : méditer analyser, recouper, avoir une vue
d’ensemble, se concerter avec d’autres.
Abdessalem Souiki estime que la thèse de l’abrogation est de l’ordre d’une offense à Dieu, c’est vouloir tout résoudre soi-même, et il s’interroge : comment Dieu pourrait-il revenir ainsi sur la moitié de sa parole, abrogeant les versets sur la convivialité, tel celui-ci, « appelle les hommes dans le chemin de ton Seigneur par la sagesse et une belle exhortation ; discute avec eux de la meilleure manière[32] », par un seul verset… Celui du sabre ?
Dieu ne peut changer d’avis, ceux qui soutiennent l’abrogation abandonnent Dieu pour sacraliser des personnes !
L’appel coranique est donc appel, à mettre en œuvre son intelligence « pour ceux qui réfléchissent » répète le texte, son ijtihâd, sa réflexion personnelle, son furqan, discernement, pour entendre le message dans son universalité sans l’arrêter à un temps T de l’histoire ou à soi-même. S’il s’agit comme le disent les salafistes de revenir à la source c’est pour la laisser couler comme une eau vive et non en faire une flalque.
Conclusion :
Nous l’avons développé, le Coran contient des passages belliqueux, nous en avons cité et analysé certains, en particulier dans la sourate 9 et la sourate 5 qui souffle le froid et le chaud sur les gens du Livre.
Nous avons montré qu’il est essentiel de lire ces textes dans leur contexte celui du texte coranique, sans les isoler de l’ensemble, celui du moment coranique de l’Arabie du VII° siècle, celui aussi de la construction plus tardive de l’islam lui-même, en lien avec la construction d’une identité politique sous les abbassides puis les omeyyades avec élaboration normative de certains versets liés en particulier au jihâd.
Cette construction de l’islam l’a fait entrer dans un paradigme hégémonique, que dénonce avec vigueur le sociologue musulman Omero Marongiu Perria[33], car il alimente le discours islamiste contemporain.
Pour Abdesallem Souiki, tous les versets sur la violence traitent de combats qui ont eu lieu « Dieu, dit-il, commente ces combats, il se fait chroniqueur et rapporte des conflits qui ont eu lieu chez les prophètes antérieurs et du temps du prophète avec ses opposants. Ce sont des récits et non l’instauration d’une manière de vivre sa spiritualité ! Passer des récits à sa reproduction c’est franchir un pas qui ne peut l’être. »
Quelle est la motivation de la guerre en islam interroge-t-il ? Le fait que l’autre ne soit pas musulman ou bien qu’il nous crée des embûches ? Ce n’est jamais la gestion de l’altérité qui justifie le recours aux armes mais l’agression subie.
Les versets violents présents dans le Coran sont à interroger sur ce qui doit fonder ou non, le recours éventuel à la violence. Et quoi qu’il en soit ce recours n’est jamais de l’ordre des individus mais de l’autorité publique.
Pour la majorité des musulmans la règle en islam c’est de vivre en paix :
« Si un polythéiste cherche asile auprès de toi accueille-le pour lui permettre d’entendre la Parole de Dieu ; fais-le ensuite parvenir dans son lieu sûr, car ce sont des gens qui ne savent pas. [34]»
Dans son discours très controversé à Ratisbonne en 2006, le pape Benoît XVI évoquant le rapport foi et raison a maladroitement cité la parole de l’empereur Manuel II paléologue dans son débat avec un sage persan, évoquant la violence de l’islam[35] :
« Montre-moi ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que du mauvais et de l’inhumain comme ceci, qu’il a prescrit de répandre par l’épée la foi qu’il prêchait ».
Trente-huit théologiens musulmans lui adressèrent en réponse, une lettre ouverte, dans laquelle ils précisent les règles traditionnelles de la guerre dite « juste » mais aussi s’appuient sur un certain nombre de versets condamnant le meurtre et la violence et appellent à rechercher et établir la justice. Ainsi peut-on lire, « que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété. [36]»
On peut considérer que cette lettre comme celle, un an plus tard, des cent trente-huit savants musulmans, adressée aux responsables des diverses communautés chrétiennes les invitant selon la parole coranique à venir à « une parole commune », expriment l’ijma, le consensus de la communauté musulmane, une des principes essentiels de l’autorité en islam.
Il serait contraire à ce que nous avons dit plus haut d’énumérer les versets pacifiques du Coran face à ceux qui prôneraient la violence, eux aussi sortis de leur contexte, comme on le voit trop souvent faire aujourd’hui, quelle que soit la position que l’on tienne.
Dans le contexte actuel il est essentiel de lire le Coran dans ce qu’il dit et non dans ce que nous voulons lui faire dire, sachant que tout lecteur est interprète.
« Ce qui fera l’unité de la lecture écrit Adrien Candiard[37], ce qui donnera le sens du texte, et pas d’un verset par-ci par-là c’est l’interprétation ».
Et nous le savons les interprétations sont multiples. Cela suppose donc d’aborder le texte coranique, comme une parole survenue dans un temps, un lieu, une culture une langue, un contexte politique, social, religieux et économique donné, sans l’essentialiser, avec les outils de la recherche historique et de l’exégèse critique.
Le Coran n’est pas un texte violent mais il offre, à ceux qui la saisissent ou la cherchent, une certaine possibilité d’un usage violent comme toute parole offerte à notre interprétation et surtout à notre intention, plus ou moins désarmée !
Des millions de musulmans de par le monde ont mis, mettent aujourd’hui, leur confiance en Dieu, définition même de l’islam et non « dans les batailles », car c’est ainsi qu’ils reçoivent la parole coranique comme un chemin à emprunter, une voie droite, qui va de l’islam l’abandon à Dieu à l’imân la foi profonde et sincère jusqu’à l’ihsân l’excellence dans le bon-agir.
Ce chemin est semé de combats à mener non « l’épée à la main mais la patience au cœur. Non armés de fusils mais de satisfaction » selon la parole du maître sri lankais Muhaiyadeen
Comme le disait Dalila, la musulmane citée au début de cet exposé, l’islam est une invitation incessante au combat, un jihâd quotidien, contre les démons intérieurs, pour entrer dans la paix avec soi et avec les autres : « O vous qui croyez ! entrez dans la Paix en totalité et ne suivez point les pas du Démon, car il est pour vous un ennemi déclaré[38] ».
[1] Rachid Benzine, Lire le Coran aujourd’hui, in Lettres à un jeune marocain, choisies et présentées par Abdellah Taïa, Le seuil, 2009.
[2] Sourate 6 verset 151
[3] Sourate 2 verset 190
[4] Jean Sleiman, Violence et sacré dans le Coran, in Vivre avec l’Islam dirigé par Annie Laurent, Ed. St Paul, Versailles, 1996, p.35-74.
[5] Sourate 2 verset 190-193
[6] Sourate 2, verset 256
[7] Sourate 4 verset 95
[8] Sourate 8,5-11
[9] Jacqueline Chabbi, Les trois piliers de l’islam, Seuil, Paris, 2016
[10] Jean Sleiman, op.cité, p. 65.
[11] Harb : guerre menée par les polythéistes contre Mohammed notamment. Sourate 5 verset 33 ; sourate 9 verset 107 ; sourate 2 verset 279 ; sourate 5 verset 64 ; sourate 8 verset 57 ; sourate 47 verset 4
[12] Sourate 49 verset 15; Sourate 9 verset 41
[13] Sourate 40 verset 25 ; Sourate 18 verset 4 ; Sourate 5,30
[14] Op.cit. p.201 sq
[15] Sourate 2 verset 190
[16] Sourate 22 verset 39 ; sourate 2 verset 190
[17] Op.cit. p.203-204
[18] Op.cit. p.208
[19] Sourate 3 verset 104 ; sourate 31 verset 17
[20] Sourate 3 versets 133-134 ; sourate 87 verset 14 ; sourate 9 verset 103 ; sourate 12 verset 53
[21] Sourate 49 verset 13
[22] Muhammad Saïd al Ashamwy, L’islamisme contre l’islam, La Découverte, Ed. Ai Fikr, 1989, p. 73.
[23] Sourate 33 verset 61
[24] Sourate 5 verset 32
[25] Michel Cuypoer, Le festinune lecture de la sourate al Mâ’ida, Lethielleux, 2007, p.145-170
[26] Le traité d’Houdaybiya ou Hodeïbiya, est un pacte signé en 628 entre Mahomet et les autorités mecquoises, qui devaient permettre au prophète de l’islam et à ses fidèles de se rendre en pèlerinage à La Mecque pendant trois jours l’année suivante. Il prévoyait également une période de paix de dix ans entre les deux parties1. Mais les Mecquois brisèrent le traité l’année suivante2, et en janvier 630, Mahomet décide de conquérir la ville.
[27] Sourate 9 verset 6
[28] Op.cit. Rachid Benzine, Lire le Coran aujourd’hui, in Lettres à un jeune marocain, choisies et présentées par Abdellah Taïa, Le seuil, 2009.
[29] Sourate 2 verset 256
[30] Sourate 16 verset 125 et sourate 29 verset 46
[31] Abdessalem Souiki, Pour sortir d’un discours dogmatique, Chemins de dialogue N° 48, p.81-97
[32] Sourate 16 verset 25
[33] Omero Marongiu Perria, Rouvrir les portes de l’islam, Atlande, Paris, 2017
[34] Sourate 9 verset 6
[35] Benoît XVI, discours lors de la rencontre avec les représentants du monde des sciences, Ratisbonne, 12 septembre 2006
[36] Sourate 5 verset 8
[37] Adiren Candiard, Comprendre l’islam (ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien), conférence à la paroisse Ste Clotilde, Paris 7°, 20 septembre 2015
[38] Sourate 2 verset 208